Ô Prince miniature aux rêves démesurés,
César d’opérette au front glacé de l’Est,
Tu brandis des fantômes jadis révérés,
Et peins d’or mensonger ton empire funeste.
Ton sceptre vermoulu tremble entre tes doigts secs,
Quand, drapé d’oripeaux d’un passé défraîchi,
Tu souffles à ton peuple un discours cacochyme :
„Ce n’est point guerre — non, mais ballet des baïonnettes !“
Ah ! que tes panégyres au ton délirant
Résonnent creux, tel l’écho dans une caverne :
On y vante des triomphes fulgurants
Là où ne gisent que silences et cendres.
Tu proscris la parole, interdis l’assemblée,
Jettes aux fers quiconque ose lever son cœur,
Et d’un décret frivole, au verbe policé,
Bannis jusqu’à l’idée d’un malheur intérieur.
Ô pâle imitateur des fastes soviétiques,
Tu rêves en secret de statues colossales,
Erigeant sur la neige austère et nostalgique
Un trône fait de peur, de ruines et de râles.
Mais l’histoire, inflexible, épiera ton orgueil ;
Chaque empire bâtit sa tombe avec ses gloires.
Toi qui changes le nom des guerres en orgueil,
Tu n’ôteras jamais le sang de la mémoire.
Et quand, dernier Titan de carton couronné,
Tu contempleras seul tes horizons flétris,
Tu comprendras trop tard, dans ton palais gelé,
Que les mensonges froids n’engendrent point l’infini.