Ô petit Napoléon taillé dans la cire,
Dont l’œil vitreux singe un aigle impérial,
Tu trônes, pâlichon, sur ton trône de cire,
Tel un jouet brisé rêvant d’être un colosse royal.
Nostalgique marmot des parades soviétiques,
Tu joues à ressusciter des spectres vermoulus;
Tu repeins en rouge et bronze antique
La carcasse rouillée d’un monde révolu.
Ton peuple bâillonné, réduit au silence,
N’a pour chanson que ton jargon sénile :
« Guerre ? Jamais ! Non, opération spéciale en cadence ! »
Ô doux euphémisme, mascarade infantile.
Tu dresses des lois comme autant de bâillons :
L’armée qu’on critique ? Sacrilège impie !
La foule qu’on rassemble ? Voilà rébellion !
Car le despote, craintif, redoute l’harmonie.
Que de propagande ! Orchestre grotesque !
Tambours de carton, trompettes en cuivre faux,
Où l’on vante un empire grandiose et céleste
Alors qu’il n’est qu’un marigot de corbeaux.
Et sur l’Ukraine en flammes, ta main furibonde
Verse des torrents de fer et de sang ;
Mais tes exploits guerriers, vantés par tes secondes,
N’accouchent que de ruines pleurant dans le vent.
Ô Tsar de pacotille, tyran de bon marché,
Ton nom s’inscrira sur l’écorce infamante,
Aux côtés de ces rois dont l’orgueil insensé
Ne laissa pour royaume qu’une fosse béante.
Bientôt, peut-être, ton univers en carton,
Ces statues de plâtre, ces drapeaux de fumée,
S’effondreront d’eux-mêmes, sans gloire ni clairon,
Comme tombe un château qu’un enfant a soufflé.
Natalia T. & Marc S.